Le 22 février 2013, dans le cadre
du programme des rencontres de l’honnête volupté.
Abstract rédigé par l’auteur.
«Les tables
napoléoniennes proposent une grande richesse de mets. Le poissonnier Méric à
Paris livre une belle variété de poissons au palais de l’Élysée : turbots, darnes de saumon, crêtes de morues, raies, brochets,
cabillaud, anguilles, truites, soles, barbues, barbillons, carrelets, seiches,
carpes, écrevisses, limandes, rougets, harengs, homards». Autant de produits que l’on peut retrouver sur la table élyséenne,
un siècle et deux Républiques Françaises plus tard…
Le dîner du 24 juin 1964 offert par le Général de
Gaulle, au Palais de l'Élysée, en l'honneur de Son Altesse Royale
Samdech Préah Norodom Sihanouk Upayuvareach, chef de l'État du Cambodge propose un consommé froid «Rubis», des suprêmes de soles «Marigny», un dindonneau de Bresse sauce Périgueux
accompagné de fonds d'artichauts «Saint-Germain» et un dessert des fraises «Melba», soit un repas à quatre services.
Quel chemin parcouru, quelle évolution en un siècle de réceptions et
de menus à la table de la présidence de la République Française ? Quelle différence entre le «caneton de Rouen au
cresson» servi sous Napoléon comme un nouveau produit, et la «pêche Melba», servie sous Charles de Gaulle, mais créée
en 1893 par Auguste Escoffier qui dirigeait les cuisines de l'hôtel Carlton à Londres.
L’étude présentée tente de répondre à ces questions en approfondissant
les menus de réceptions officielles, au cours de la Ve République, sous trois
présidences continues : Charles de Gaulle, un général qui débute la
toute nouvelle Ve République durant la période de 1959 à 1969. De 1969 à 1974,
Georges Pompidou, ancien premier ministre du général, au record de longévité à
l’Hôtel de Matignon, prend la suite. Enfin, durant la période de 1974 à 1981, le plus jeune
président de la Ve République est élu à quarante-huit ans : Valéry Giscard d’Estaing . Ces trois présidents ont eu une
accession au pouvoir très différente et ils ont aussi exprimé, au cours des
responsabilités qui leur a été confiées, leur personnalité singulière voire
atypique autour de la table présidentielle, même s’ils ont des convictions
politiques proches.
La spécificité française en matière de préparation culinaires, de
production de produits alimentaires de qualité ou la longue expérience en
matière vinicoles, restent des références que les présidents de la République,
souhaitent conforter et promouvoir. Leur origine familiale et sociale, leur
formation, leur expérience politique, leurs préférences culinaires ont permis à
ces trois présidents de dompter un protocole parfois rigide en donnant à la
table présidentielle, outre le faste nécessaire qu’il convient, un vrai
témoignage de leur différence de style.
Anthelme BRILLAT-SAVARIN disait : «Les repas sont
devenus un moyen de gouvernement, et le sort des peuples s'est décidé dans un
banquet». Chaque président de la République a souhaité laissé une empreinte
de son mandat, celle de ses goûts culinaires n’a pas échappé à ceux qui ont
partagé les grandes réceptions officielles en l’honneur de chefs d’États et souverains étrangers. Mais c’est une certaine continuité de
l’État qui a permis de promouvoir le sens aigu du raffinement des
réceptions françaises présidentielles. En politique comme
ailleurs, le repas, qu’il soit d’ordre privé, officiel, de travail ou d’État, permet de concilier les oppositions, de rapprocher les
contraires, de trouver le compromis qui résulte de l’essence même du partage de
la nourriture, celle de la pacification sociale et politique. Car la politique
divise les hommes, la gastronomie les réunit.
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