mardi 7 avril 2020

Pierre Saunier nous a quitté.


Disparition de l’un des nôtres. Pierre Saunier nous a quitté.

Nous sommes le 7 avril 2020



Bonjour à toutes et à tous

Si hier à quelques un(e)s d'entre vous je me réjouissais de leur annoncer que trois d'entre nous allaient désormais bien, disons beaucoup mieux après trois semaines compliquées, hier soir alors que je regardais mes mails une dernière fois vers 23 h, j'ai découvert et lu le message de Martin Bruegel.

Pierre Saunier était l'un de nos adhérents depuis le départ de notre société et de ses Rencontres dès 2002. Il assistait et bien sûr participait à nos banquets. Il était intervenu dans le cadre de nos Rencontres le 16 mai 2014 sur « Les repas hors normes ». Titre  qui lui allait si bien, lui-même hors norme par son immense culture, ses questions pertinentes, ses précisions si justes ... et puis sa grande discrétion, sa gentillesse, son humour aussi et tant d'autres qualités.

Nous voyant un peu désarmés il y a trois ans alors que nous étions à la recherche d'un nouveau lieu pour nos banquets, il s'était mis en chasse et c'est grâce à Pierre que nous avons pu depuis nous retrouver  au Pré vert rue du Moulinet. Pierre nous manque déjà. Il était encore avec nous le 28 février, là encore ses questions, ses précisons étaient au rendez-vous. Il n'est pas venu le 13 mars, comme bon nombre d'entre nous, nos Rencontres n'ont alors réuni que 3 personnes, je n'étais pas là non plus.

Pierre était ingénieur INRA, avec Martin Bruegel qui le connaissait bien ils avaient ensemble publié un article en août 2015 :" Pourquoi les conserves auront tardé à se mettre à table" (hors série co-édité par le Monde et La Vie. En 2014 il participait au colloque La viande : fabrique et consommation, son intervention : « Le boucher : un commerçant qui vend un produit en 'l'état' ou un artisan qui vend un produit qu'il transforme? Hypothèses sur le classement de la boucherie dans le commerce depuis la fin du XIXe siècle. »

C'est donc avec une immense tristesse que je m'adresse à vous. Souvenons nous de l'homme que Pierre était.

Dans le message de Martin Bruegel une adresse, celle de la famille de Pierre à laquelle nous pensons, et en particulier à sa fille dont il parlait de temps en temps, car sur sa vie Pierre était d'une grande pudeur

Très amicalement à vous toutes et tous



Anik Buj

Présidente de De Honesta Voluptate

Société des amis de Jean-Louis Flandrin



Un ajout de Valérie Boudier qui vient de me parvenir

« L'un de ses derniers articles - si ce n'est le dernier - a été publié il  y a exactement un an sur Aofood dans un numéro spécial consacré à  l'espace de travail de la viande, coordonné par Anne-Hélène Delavigne et  par moi-même.

L'intitulé de son texte : "Les figures géométriques de l'élevage  intensif et de l'abattoir industriel" atteste bien de l'approche  originale qui était la sienne.

Pour consulter ce numéro spécial d'Aofood, cliquer sur le lien suivant :  https://journals.openedition.org/aof/9805. Les écrits restent... »




In memoriam Pierre SAUNIER

Pierre Saunier, membre fidèle de la Société des amis de J.L. Flandrin, nous a quitté le 1er janvier dernier à l’âge de 81 ans. Economiste, directeur de recherche à l’INRA, bon connaisseur des travaux de J.L. Flandrin et très intéressé par tout ce qui touchait à l’histoire de l’alimentation, il avait rejoint, retraite prise, notre Société en 2007. Il était un fidèle de nos Rencontres et un participant très impliqué de nos banquets historiques de fin d’année. Dès le premier de ces repas auxquels il participa, celui illustrant la Cuisine espagnol du Siècle d’Or, il avait tenu à entrer avec rigueur dans notre démarche d’archéologie historique. Il était intervenu lors d’une de nos rencontres, en 2014, sur le thème des Repas hors normes, une façon de marquer son originalité intellectuelle. Pierre était pour nous tous un homme de valeur, discret et très présent, précieux par sa grande culture et par ses remarques enrichissantes lors de nos discussions, par ses analyses qui nous éclairaient dans nos recherches, par son humour aussi, un homme chaleureux qui nous manque déjà !

Ses travaux de recherche ont été très riches. Chercheur peu orthodoxe, il était animé par la conviction que c’est en faisant entrer le regard analytique de l’économiste dans ce qui peut n’apparaître que comme de petits faits que l’on peut comprendre réellement les choses, façon de pratiquer une étude économique au plus près du vécu. Son grand domaine de recherche a été l’industrie et la production agro-alimentaires, travaillant sur la progression de l’industrialisation et les évolutions technico-économiques, se souciant d’analyser les crises laitières comme le développement de la restauration collective. La viande et sa production ont tenu une grande place dans ses recherches, entre industrie de la volaille, fonctionnement des abattoirs et évolution de la pratique des bouchers et des consommations. Parallèlement à son intérêt pour l’alimentaire, il s’est aussi soucié du travail, entre analyse de l’ouvriérisme, de l’ouvrier fordiste ou pré-fordiste…

Très apprécié comme chercheur, riche d’expériences et de savoirs dans les domaines de recherche que nous fréquentons, il aura été un chaleureux compagnons de nos Rencontres comme de nos banquets. Nul doute qu’il aura marqué pour longtemps chacun d’entre nous !

                                                                                                   Georges Carantino
                                                                                                        17 avril 2020

Pierre Saunier

Bibliographie sommaire :


(avec F. Labouesse et D. Hairy), Croissance et concentration dans l’industrie laitière, in Economie rurale, n° 71, 1967.

(avec D. Hairy, D. Perraud, et B. Schaller), Excédents laitiers et crise agricole en France, in Etudes rurales, n° 46, 1972.

L’évolution de la consommation de viande en France, in L’alimentation et la vie, n°60, 1972.

Les déterminants économiques et sociaux de l’alimentation dans le long terme, in Annales de la Nutrition et de l’alimentation, n°30, Paris, 1976.

L’aviculture française 20 ans après, Paris, Inra, 1978.

L’expansion de la restauration collective : un développement qu’il ne faut pas surestimer, in Cahier de Nutrition et de Diététique, 13/3, 1978.

L’industrie française des viandes de volailles : les raisons de la faible rentabilité et de la tendance à la déconcentration dans le secteur, in Revue d’économie industrielle, n°34, 1985.

L’évolution de l’emploi dans les industries agricoles et alimentaires depuis le début du XXe siècle, in Economie rurale, n°178-179, 1987.

L’ouvrier fordiste et l’ouvrier pré-fordiste, types, contretypes et stéréotypes ouvriers des années 1970-1980, Paris, Inra, 1989.

L’ouvriérisme universitaire, du sublime à l’ouvrier-masse, Paris, L’Harmattan, 1993.

(avec B. Schaller), L’évolution technico-économique des industries alimentaires (1896-1987), in G. Allaire, R. Boyer (éd), La grande transformation de l’agriculture, Paris, Inra éditions, 1995.

(compte-rendu), Marc Jacobs, Peter Scholliers (éds), Eating out in Europe. Picnics, gourmet dining and snacks since the late eighteenthcentury, Oxford, Berg, 2003, in Revue d’histoire moderne et contemporaine, 2004/3 (n°51-3).

(compte-rendu), Olivier Londeix, Le biscuit et son marché. Olibet, LU et les autres marques depuis 1850, Rennes, PUR/PUFR, 2012, in Revue d’histoire moderne et centemporaine, 2014/4-5 (n°61-4/4bis).

(avec M. Bruegel), Les conserves tardent à se mettre à table, in L’histoire des inventions, Paris, Le Monde-La Vie, 2015.

Le boucher, un commerçant qui vend en l’état ou un artisan qui vend ce qu’il découpe ?, in M.-P. Horard, B. Laurioux  (éd.), Pour une histoire de la viande, Tours, PUR/PUFR, 2017.

Les figures géométriques de l’élevage et de l’abattoir industriel : leurs déterminants économiques, in Anthropology of Food, n°13, 2019.