lundi 8 décembre 2014

Le carreau du temple, Manuel Charpy



Aux Edition Nicolas Chaudun
Le quartier du Temple à Paris, dans le 3e arrondissement, coincé entre République et le Marais, est plus connu des mordus de mode vintage, aimantés par la concentration locale de friperies et de boutiques de jeunes créateurs, que des touristes.
Cette tradition de la vente du vieux vêtement s’y installe au XIXe siècle. Alors que le quartier des Halles concentre le commerce de la viande, Bercy celui du vin, le Temple est dévolu à la fripe. Deux bâtiments sont successivement inaugurés pour accueillir une clientèle interlope : sous le Premier Empire, en 1811, la halle en bois de Jacques Molinos ; à la fin du Second Empire, en 1865, la halle en fer et en verre de Jules de Mérindol, sur le modèle des pavillons Baltard. Le « carreau », qui désigne un espace de trottoir libre où les vendeurs de deuxième main s’installent à même le sol, occupe alors une partie des halles où se vendent des vêtements de qualité inférieure.
On pourrait s’amuser à faire remonter cette tradition de la nippe au XIIe siècle, lorsque l’ordre des Templiers règne sur l’enclos du Temple. Cette enclave du nord de Paris bénéficie d’un statut fiscal particulier et jouit du privilège de franchise qui l’exempte de taxes. Aussi toute une population de commerçants s’y installe. Lors des fouilles du Carreau, en 2004, les archéologues mirent à jour des tabletteries en os qui servaient de formes pour faire des boutons…
Il ne reste aucun vestige de l’enclos antérieur au XIXe siècle, mais des souvenirs : celui du jeune Mozart jouant en 1764 dans les salons du prince de Conti alors grand prieur au Temple ; celui de Louis XVI et sa famille emprisonnés au donjon en août 1772 ; celui de la mort du dauphin en juin 1795. Puis le mur d’enceinte est détruit, des rues sont tracées, Alphand y établit un square, un lavoir et des bains publics sur lesquels sont construits la mairie de l’arrondissement.
En ce printemps 2014 s’inaugure le Carreau, complètement rénové par le studioMilou, avec un premier défilé Yves Saint Laurent en hommage décalé – et peut-être involontaire – à cette population de la fripe.

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