jeudi 7 mars 2019

L’Empire ROMAIN par le menu, Prix Antony Rowley 2018.


Dimitri Tilloi d’Ambrosi
L’Empire ROMAIN par le menu, Prix Antony Rowley 2018.
Préface de Yann Le Bohec
Editions  Arkhé, octobre 2017

 Dimitri Tilloi d’Ambrosi est agrégé d’histoire, sa spécialité l’Antiquité romaine et plus particulièrement son alimentation. Actuellement il achève sa thèse intitulée « Galien et Apicius : les rapports entre médecine et cuisine dans le monde romain (IIe s av. J.-C. - IVe s ap. J.-C.) »,  ce tout en enseignant dans le secondaire et à l’université.

L’Empire Romain par le menu porte sur l’alimentation à Rome et son Empire du IIème siècle av. J.-C. au Vème siècle ap. J.-C. Ici fi des clichés et des idées reçues symbolisant l’alimentation romaine limitée le plus souvent à ses banquets plantureux et  licencieux. Dimitri Tilloi d’Ambrosi va bien au-delà d’« une description classique du repas romain » avec ce que nous connaissons généralement de ses nombreux produits et de ses mets,  essentiellement par la lecture des textes culinaires,  des traités de diététique et d’agronomie. D’ailleurs il nous est quasiment impossible d’être à même à propos de ce repas de faire la distinction entre Rome, son empire et ses confins ainsi qu’entre la République, l’Empire de ses débuts et de son déclin. C’est pourquoi cet ouvrage qui est essentiel pour une meilleure connaissance de l’histoire de l’alimentation tant de cet espace que de cette période.

Dimitri Tilloi d’Ambrosi s’intéresse tout d’abord aux produits disponibles sur le marché, à leurs provenances, à leurs modes de transport et de conservation mais aussi à leurs prix, tant pour les plus pauvres que pour les plus aisés et ce sur les aires géographiques et les périodes couvertes par son étude. Cela lui permet de s’interroger sur le  rôle des aliments et des boissons comme marqueurs socio-culturels.
Puis il développe comment la cuisine à Rome est marquée sur le long terme par les influences extérieures. De stricte préparation répondant à de simples besoins physiologiques elle devient plus raffinée, on peut même alors parler de gastronomie avec un véritable développement de la gourmandise, bien entendu pour les plus fortunés. C’est ainsi qu’elle devient un élément important de l’hospitalité. C’est pourquoi des règles de bienséance se développent. La salle à manger, le triclinium, devient un espace essentiel dans l’art de bien recevoir.  Un véritable ordre des mets s’instaure, Jean-Louis Flandrin aurait été ravi de lire les pages qui lui sont consacrées. Parallèlement l’évolution du statut du cuisinier est ici étudiée.
S’intéresser à la cuisine sans traiter de santé  serait très réducteur c’est pourquoi Dimitri Tilloi d’Ambrosi s’attache ensuite à traiter de la « question des interactions entre la médecine et la cuisine entre l’époque républicaine et impériale ». Pour lui il s’agit « d’expliquer comment les médecins définissent leur propre cuisine et cherchent à concilier le plaisir du goût et le soin du corps ».
Pour élaborer cette recherche très précise l’auteur fait appel  certes aux textes qui nous sont habituels mais en y ajoutant biographies, correspondances, littérature  théâtre, satire, poésie) , textes philosophiques (pythagoriciens, stoïciens) tout en utilisant, et c’est là sa grande originalité, les sciences auxiliaires de l’histoire que sont l’anthropologie, la sociologie, l’épigraphie, l’iconographie, l’archéologie avec tous les progrès qui y sont attachés par la prise en compte de la céramologie, de la carpologie, de l’archéozoologie, de l’ostéologie, de la palynologie  et sans doute j’en oublie…
Par ailleurs et ce n’est pas la moindre des qualités de son ouvrage  Dimitri Tilloi d’Ambrosi  n’hésite pas à faire le lien entre son sujet et les questions qui traversent notre propre époque à propos de notre alimentation avec la recherche du manger bon, du manger sain…
Enfin la lecture de cette étude par son style agréable est aisée, un bon moment en perspective.  À déguster sans modération.


Dimitri Tilloi d’Ambrosi  est intervenu dans le cadre des Rencontres de de Honesta Voluptate, Société des Amis de Jean-Louis Flandrin, le  8 février 2019.

Anik Buj

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire